Un article du quotidien Mutations.
Indiscipline - A l'école du mégot
Le Quotidien Mutations
(Yaoundé)
ACTUALITÉS
26 Février 2007
Publié sur le web le 26 Février 2007
By Dippah Kayessé
En dépit du règlement intérieur, des élèves continuent de s'adonner à la consommation du tabac.
Les cours au collège Iesb de Douala sont terminés depuis plus d'une heure. Alors que certains élèves de cet établissement regagnent le domicile familial, d'autres par contre, une bande de cinq, ont pris le chemin d'un bistrot situé à moins de 150m de leur école. Outre la bière posée sur la table et qui coulerait sans arrêt, ces jeunes, garçons et filles, se servent sans retenue dans l'unique paquet de cigarettes à leur disposition. "Ne me demandez surtout pas pourquoi, je fume. De toutes les façons,la cigarette noie les soucis", déclare, une des deux filles du groupe, le mégot coincé entre les doigts.
Dans cet espace très réduit où d'habitude les abonnés étouffent sous l'effet de la chaleur, la fumée qui monte a presque totalement envahi les lieux. On dirait la cuisine de la grand-mère. Conscients du danger qui les guette dans leur besogne, ces élèves avaient pris soin d'enfouir le "haut" de leur uniforme dans les sacs. Le cas du collège Iesb de Douala est loin d'être un phénomène marginal.
Dans le milieu de l'éducation, la consommation du tabac, à l'intérieur ou à l'extérieur des établissements scolaires, demeure effective et varie d'une école à une autre. Parmi les raisons qui militent en faveur de cette pratique, les plus récurrentes sont la décrépitude de la discipline dans ces établissements, la floraison des petits commerces aux alentours des écoles, le mimétisme... "Nous regrettons aussi l'irresponsabilité de certains enseignants qui, d'une main tiennent la craie et de l'autre la cigarette dans les salles de classes. Quel exemple pour la jeunesse!", explique Jean Tanga, surveillant général de la section commerciale au lycée technique de Koumassi à Douala. Lequel dresse aussi le portrait robot des élèves fumeurs. "Généralement, ce sont des élèves qui nous viennent des établissements où la discipline n'était pas de rigueur et sont dans la grande majorité des cas des garçons. Ils sont de grands enfants des classes du second cycle. Redoublants, ils savent que quel que soit leur résultat ils vont partir", ajoute-il.
Conscients des méfaits de la consommation de la drogue en milieu scolaire, la plupart des établissements scolaires ne lésinent pas sur les moyens pour traquer le mal. "Au lycée technique, tout élève surpris dans cette situation s'expose à trois jours d'exclusion définitive durant lesquels il accomplit des travaux d'intérêt collectif au sein de l'établissement", explique M. Tanga. Par contre au lycée d'Akwa de la même ville, le règlement intérieur plus rigoureux en la matière parle d'exclusion définitive pour toute consommation de cigarettes.
Outre le règlement, de nombreuses activités de sensibilisation sont mises à contribution pour décourager au maximum les élèves. Il s'agit à cet effet des différents clubs santé et scientifiques dont le but est de réduire autant que possible la consommation de la cigarette parmi les élèves. "Nous sensibilisons nos enseignants quelle soit la matière, de consacrer un peu de leur temps pour expliquer aux élèves les méfaits de la cigarette", explique Louis Lucien Mandengué, principal au collège Alfred Saker de Douala.
A l'extérieur de certains établissements, le combat se poursuit avec la même ardeur. C'est le cas au collège Libermann, au lycée d'Akwa et technique de Koumassi. "Nous gardons l'oeil sur les caisses des vendeurs de friandises installés à nos portes. Une interdiction ferme leur a été faite de ne point vendre des cigarettes", reconnaît François Engal, censeur du second cycle au lycée d'Akwa de Douala. Seulement, ces dispositions ne portent toujours pas les résultats attendus car ceux installés plus loin ne se soucient guerre de l'éducation de ces élèves fumeurs.
"Parfois, ils arrivent sans uniforme, comment donc reconnaître que ce sont des élèves? Aussi sur le paquet de cigarettes, il n'est pas écrit interdit aux élèves", lâche, complaisant, un commerçant installé aux alentours du collège Alfred Saker et qui semble ne regarder qu'au gain. "Ce n'est toujours pas évident pour nous de pourchasser ces enfants hors de l'établissement raison pour laquelle nous en appelons à plus de responsabilité de la part des parents", recommande François Engal. Lequel, à l'instar de nombreux autres responsables, reconnaît que la consommation du tabac de nos jours au sein des établissements scolaires serait, malgré tout, en nette régression. Et dans les lycées, les surveillants penchent toujours est pour la sensibilisation avant la chicotte de la sanction.
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