Mort dans l’Ouest est un documentaire de 30 minutes qui a été réalisé en 1976 par Peter Taylor pour la chaine de télévision britannique Thames TV.
Immédiatement à la suite de sa première diffusion en Grande Bretagne, Philip Morris a porté plainte et obtenu qu’il soit fait interdiction à Thames TV de vendre le film (CBS avait déjà fait une proposition pour le diffuser aux Etats-Unis) ou de le diffuser à nouveau.
Dans le cadre d’un arrangement à l’amiable avec Philip Morris, Thames TV a cédé aux fabricants toutes les copies du film sauf une qui devait rester dans le coffres de la chaîne.
Peter Taylor a raconté en détail les péripéties du film dans son excellent livre The Smoke Ring.
En décembre 1981, une grosse enveloppe marron est arrivée à San Francisco dans la boîte aux lettres de Stanton Glantz, un des activistes anti-tabac américains les plus renommés : elle contenait une copie pirate de Mort dans l’Ouest. Le 11 mai 1982 Mort dans l’Ouest commençait une seconde carrière, au milieu des menaces de procès de Philip Morris, menaces qui sont toujours restées vaines, même si elles ont suffi à en faire reculer plus d’un.
Par exemple, Mort dans l’Ouest n’a jamais été diffusé sur aucune chaine de télévision en France quoique je leur ai proposé à toutes tant la version originale qu’une version doublée en français réalisée à partir de la traduction que j’avais personnellement réalisée dans le cadre de Tabac-Environnement à l’automne 1986, c'est à dire quelques mois seulement après la création de l'association.
Il est intéressant de noter que les droits du livre de Peter Taylor, The Smoke Ring, avaient été acquis par les éditions Lattès qui en avaient fait éxécuter la traduction en français, un travail conséquent puisque l’ouvrage fait environ 500 pages serrées. Sans raison apparente les éditions Lattès ont abandonné le projet et la version française du livre de Peter Taylor n’a jamais vu le jour.
J’ai décidé d'insérer la version française que j'avais réalisée du script du reportage parce que je crois que c’est un document remarquable qui a beaucoup influencé ma conception de la lutte antitabac (tout comme le livre).
L’industrie du tabac -en l’espèce ici Philip Morris mais n’importe quel autre fabricant de cigarettes aurait tenu le même langage- s’y montre pour ce qu’elle est : retranchée dans ses mensonges et prête à tout contre ceux qui la mettent en cause.
On y voit les victimes, trop souvent oubliées, spécialement en France.
J’avais réalisé en plus de la version française du documentaire une adaptation du programme pédagogique conçu par l’Université de Berkeley. En raison des moyens très faibles dont disposait Tabac-Environnement et de l’inertie du Ministère de l’education Nationale auquel j’avais présenté ce programme, un nombre infime d’élèves ont eu connaissance de ces documents alors qu’ils auraient dû –selon moi- faire l’objet d’une diffusion massive.
Ce film symbole sera-t-il un jour ressorti des archives du CNCT ? les chaînes de télé et les cinémas oseront-ils le diffuser? On peut l'espérer. Il me vient aussi à l'esprit que le CNCT pourrait probablement réaliser une version dvd...
Ce ne sera en tout cas pas grâce aux inspecteurs de l’IGAS. Soucieux de m’accuser de toutes les malversations possibles ils ont notamment pointé la cession que j’avais faite du film et du programme au CNCT. Alors que je leur demandais s’ils voulaient visionner ce classique censuré puis libéré de la lutte anti-tabac, ils ont instantanément refusé pour foncer avec un air entendu sur une autre pierre à me mettre au cou.
J’espère que contrairement à eux vous ne bouderez pas ce travail dont je suis particulièrement fier et que vous interviendrez auprès des chaînes de télé, du Ministère de l’Education Nationale, des salles de cinéma et du CNCT pour qu’il soit enfin diffusé et utilisé.
Voici donc ma version française du reportage interdit de Peter Taylor.
Texte de l’avertissement introductif de la vidéo diffusée par Pyramid Films (Pyramid est le distributeur du film aux USA mais ne propose pas de version française).
Ce film est à usage éducatif.
Il est uniquement destiné à des projections à but non lucratif.
Mort dans l’Ouest est présenté en coopération avec la Fondation pour les droits des non-fumeurs (de Berkeley).
En 1976, la chaîne de télévision britannique Thames TV a produit et réalisé Mort dans l’Ouest, un reportage sur la campagne de pulbicité la plus efficace de l’histoire, celle qui a pour héros le cow-boy Marlboro.
Juste après la première diffusion de cette émission, la société Philip Morris qui fabrique les cigarettes Marlboro a intenté un procès à Thames TV devant un tribunal anglais.
A la suite d’un arrangement amiable resté secret, toutes les copies du film ont été détruites en 1979.
Cependant, en 1981, le professeur Stanton Glantz, qui est professeur de médecine à l’Université de Californie à San Francisco a reçu au courrier, de façon anonyme, une copie de « Mort dans l’Ouest ».
Et en 1982, une station locale de télévision de San Francisco, KRON TV, l’a diffusé.
Depuis ce film a été projeté dans le monde entier. (Mais jamais en France)
Voici ce document que vous étiez sensé ne jamais revoir.
Voici l’histoire de la cigarette Marlboro, ou comment une petite marque sans importance est passée à la première place avec une image aussi forte que le western américain. Voici l’histoire de Marlboro.
Peter Taylor : Voici le pays de Marlboro, l’Ouest américain, le décor de la publicité de cigarette la plus efficace de l’histoire. Marlboro, la marque de cigarette la plus vendue au monde est fabriquée par Philip Morris, un des fabricants de cigarettes les plus riches, celui dont la croissance est la plus forte.
Publicité Marlboro : Vous avez déjà 80 km dans les bottes et encore autant à parcourir avant demain. Vous êtes au pays de Marlboro.
Peter Taylor : Voici des hommes Marlboro. De vrais cow-boys, des symboles basanés de virilité, de santé, d’indépendance. Bob Julian et son frère sont aussi de vrais cow-boys, du Wyoming. Mais pour Bob, la randonnée sera bientôt finie.
Bob Julian : J’ai commencé à fumer quand j’étais tout jeune, en suivant les cow-boys, les champions de rodéo. Je pensais que pour être un homme il fallait avoir une cigarette à la bouche. Il a fallu des années pour que je découvre que tout ce que j’ai gagné à fumer c’est un cancer du poumon. Maintenant je vais mourir, encore jeune.
P.T : Quel âge avez-vous ?
Bob Julian : J’ai 51 ans.
Le médecin de Bob Julian : A mon avis, M. Juilan a un cancer du poumon directement parce qu’il fumait. Il a toujours vécu dans une région sans pollution industrielle et son seul facteur de risque tout au long de sa vie a été son tabagisme.
P.T : Si vous étiez convaincu que les cigarettes tuent des gens, est-ce que vous arrêteriez d’en fabriquer ?
James Bowling (Vice-Président, Philip Morris) : Eh bien, ma position là-dessus est claire depuis longtemps. Mon métier ne consiste pas à tuer des gens, évidemment. J’ai toujours dit, simplement, qu’il y a beaucoup de moyens de gagner sa vie et je crois beaucoup à ce que je fais, mais je suis d’abord avant tout un être humain. Si je pensais le contraire, je ne le ferais pas, je ne fumerais pas moi-même, je ne permettrais pas à ma femme ou à mes enfants de fumer. Mais je suis, je pense, quelqu’un de rationnel. Je pense que j’ai probablement davantage étudié la question que la plupart des gens que vous rencontrerez, beaucoup plus probablement que de nombreux scientifiques qui s’expriment à ce sujet. Et j’ai choisi de fumer. Fumer est un plaisir pour moi. Et c’est pareil pour 60 millions d’Américains et de gens qui fument partout dans le monde.
Dr Daniel Horn (Directeur du Bureau Américain sur la santé et le tabagisme) : Ils ont évidemment adopté la position selon laquelle ils veulent continuer à vendre des cigarettes. Ils n’ont pas l’intention de cesser d’en fabriquer et de faire un autre métier qui serait meilleur pour le bien public. Et bien sûr, s’ils continuent à vendre des cigarettes, il faut qu’ils croient que c’est un produit honorable à vendre. Mais je ne pense pas que les arguments qu’ils utilisent pour s’en persuader devraient être présentés au public comme s’il y avait une sorte de débat entre les bons -l’industrie du tabac- et les méchants –les scientifiques- qui disent que des milliers de gens meurent aujourd’hui et meurent plus tôt qu’ils ne l’auraient dû parce que la fumée des cigarettes qu’ils ont inhalée produit des cancers, produit des crises cardiaques, produit des emphysèmes…
P.T : Alors qu’un orage se prépare au dessus des grandes plaines de Cimarron, au Nouveau-Mexique, John Holmes fait rentrer son bétail.
John Holmes : J’ai commencé à fumer quand j’avais 17 ans ; je pensais que c’était la chose à faire. Je pensais que çà me donnerait une stature, que çà ferait de moi un homme.
P.T : Depuis 10 ans, John Holmes qui a 64 ans est gravement handicapé…
John Holmes : Si j’avais su alors ce que je sais maintenant…
P.T : Il a de l’emphysème.
Au ranch, sa femme le regarde et attend.
John Holmes : C’est difficile à décrire, sauf quand on a vraiment mal. Alors il faut que je m’arrête et je cherche ma respiration. C’est comme si quelqu’un m’étranglait et que l’air ne passait plus. Je m’arrête un peu, çà s’arrange et je peux repartir.
Médecin de John Holmes : John a été un très gros fumeur, pendant des années. Je suis persuadé que les cigarettes sont la cause de son emphysème pulmonaire. Les patients qui ont un cancer du poumon meurent très vite, en quelques mois, quelques années au plus. Ceux qui souffrent d’emphysème se traînent pendant des années. Assez fréquemment la maladie évolue en s’aggravant progressivement pendant 10, 15, 20 ans et ils sont misérables tout le temps, de plus en plus malades au fil des ans. C’est en fait une lente destruction : ces malades perdent leurs poumons. Ils disparaissent. C’est une terrible façon de survivre et de mourir.
Annonce du film publicitaire Marlboro : Voici la nouvelle usine de Marlboro à Richmond en Virginie.
Cette unité de 200 millions de dollars est à l’image de Philip Morris en 1976. Elle représente notre investissement le plus important et symbolise notre confiance dans l’avenir de l’industrie de la cigarette, la croissance continue de nos principales marques aux Etats-Unis et sur les cinq continents. Nous fabriquons et distribuons nos produits dans 160 pays et les ventes de nos marques sont en croissance rapide, y compris Marlboro qui en 1972 est devenue la marque n°1, la plus vendue au monde.
P.T : Pendant que Marlboro devenait la marque de cigarette n°1, l’organisation Mondiale de la Santé a confirmé que fumer provoque des cancers du poumon, cause des bronchites, de l’emphysème et des maladies cardiovasculaires. L’OMS est parvenu à ces conclusions après avoir révisé 25 années de recherches sur le tabagisme.
Le rapport de l’OMS a été réalisé par les principaux experts médicaux et scientifiques dans ce domaine. Est-ce que vous doutez sérieusement de ce qu’ils disent ?
Dr Helmut Wakeham (Vice-président pour la science et la technologie Philip Morris) : Je n’ai pas lu le rapport dans le détail.
P.T : Ne devriez-vous pas le lire ?
Dr Wakeham : Eh bien, j’en connais les grandes lignes. Je sais aussi que la plupart des gens qui sont impliqués dans le débat sur le tabagisme et la santé sont des gens qui ont pris à de nombreuses occasions des positions que je considérerais comme extrêmes dans ce domaine.
Après tout, ils ont pour but d’améliorer la santé des gens et ils ont donc tendance à être très conservateurs à cet égard. On ne s’attend pas vraiment à ce qu’un rapport de l’OMS dise que boire de l’alcool est bon pour la santé ou que fumer est bon pour la santé.
P.T : Sauf s’ils pensaient que c’était le cas. Et apparemment ils ne le pensent pas.
Dr Wakeham : Oui
P.T : A cause de l’évidence accumulée en 20 ans.
Dr Wakeham : Et maintenant on découvre que toutes sortes de choses sont mauvaises pour la santé.
P.T : Et ils disent que c’est le cas pour les cigarettes.
Dr Wakeham : Oui, les cigarettes en font partie. Et alors, que devons-nous faire ? Vous savez, le meilleur moyen de ne pas mourir c’est de ne pas être né.
P.T : En tant que fabricant de la cigarette la plus vendue au monde, vous sentez-vous concerné quand l’OMS dit que les cigarettes sont la cause d’une épidémie mondiale qui tue aujourd’hui chaque année des centaines de milliers de fumeurs ?
Dr Wakeham : Est-ce que je suis concerné ? Je ne suis pas concerné de la façon que vous pensez. Je suis concerné parce que des gens lancent des accusations, y compris contre nos produits, sans la connaissance adéquate. Il n’existe aucune sorte de recherche qui permette à quiconque de dire cela.
P.T : Pensez-vous que les gens ont raison d’être inquiets de ce que les médecins leur disent ?
Dr Wakeham : Maintenant vous me posez une question de morale. Je ne sais pas ce qui est bien et ce qui est mal.
P.T : Est-ce qu’ils sont sensés de tenir compte de ce que les médecins leur disent ?
Dr Wakeham : Est qu’ils sont sensés ? Oh je ne sais pas. Est-ce que vous êtes sensé quand vous suivez le conseil de votre médecin ? Ou est-ce que vous êtes sensé lorsque vous le repoussez ?
P.T : Donc vous n’êtes pas d’accord avec les médecins ?
Dr Wakeham : C’est très bien. Je ne vois rien de mal à çà. Il y a beaucoup de choses sur lesquelles je ne suis pas d’accord avec mon médecin. Un médecin m’a déjà dit de ne pas fumer. Je suis essentiellement un non-fumeur. Je fume dans le cadre de mes travaux de recherche mais ce n’est pas une habitude chez moi et pourtant les médecins vous donnent ce genre de conseil, de façon générale, par habitude plus que sur la base d’une connaissance réelle. Le médecin de base n’est pas un spécialiste dans le domaine du tabagisme et de la santé.
P.T : La nuit tombe doucement sur le désert d’Arizona. La journée de John Harlin, 55 ans, touche à sa fin.
John Harlin : J’ai commencé de fumer à 15 ans. Je n’ai jamais pensé que les cigarettes étaient dangereuses.
P.T : Il y a quelques mois il est allé chez son médecin. Il a appris qu’il avait un cancer du poumon.
John Harlin : J’ai dit à mon médecin qu’il ne m’aurait pas fait une plus grosse surprise en m’annonçant que j’attendais un bébé. C’est pour dire que je n’avais jamais pensé au cancer du poumon, en aucun cas, sous aucune forme. Probablement parce que j’ai toujours été en excellente santé toute ma vie, jusqu’à ce cancer.
Médecin de John Harlin : il ne fait aucun doute pour moi que le cancer de John Harlin vient de ce qu’il fume. D’un point de vue statistique, 90% des cow-boys que je vois avec un cancer du poumon ne l’auraient pas s’ils n’étaient pas fumeurs.
James Bowling : Il y a des tas de personnes et d’organisations qui s’expriment sur ce sujet sans avoir effectué la moindre recherche. Tant qu’ils ne peuvent pas nous dire, à nous, le public, ce qui cause le cancer, par exemple, et bien je ne pense pas qu’ils puissent porter une accusation pareille. Je pense que c’est très confortable pour tous ces gens quand ils ne savent pas d’être capables de trouver une cible. Et les cigarettes, parce qu’elles apportent un plaisir, ou quelque chose, sont une cible très facile dans beaucoup de domaines. Rappelez-vous qu’il n’y a pas si longtemps on disait dans ce pays que les cigarettes causaient la tuberculose. Et bien la tragédie pour la science a été qu’on a littéralement arrêté de chercher la vraie cause de la tuberculose. Dans les années 20, 7 états américains ont interdit la vente de cigarettes parce qu’elles causaient la tuberculose. Bien entendu on a ensuite trouvé que les cigarettes n’avaient rien à voir là dedans, mais la tragédie est que pendant ce temps on a arrêté de chercher. Combien de personnes sont mortes à cause de çà ? C’est çà que je trouve très sérieux, vraiment.
Dr Wakeham : Je pense que si l’entreprise croyait que les cigarettes sont vraiment dangereuses, nous ne ferions pas ce métier. Nous sommes une entreprise très morale. Je pense que les dirigeants de Philip Morris sont sincères sur ce point. Je pense qu’il y a beaucoup de doutes en ce qui concerne la nocivité des cigarettes. Si vous lisez les deux côtés, et pas seulement le point de vue des gens qui ont le zèle missionnaire d’empêcher le monde entier de fumer, mais les gens qui essayent d’être objectifs, vous verrez qu’il y a beaucoup de doute qui subsiste avant de décider si fumer cause vraiment tous les maux dont on l’accuse.
Dr Horn : Voilà des gens qui étaient engagés dans un métier honorable soudain confrontés à un choix : soit accepter le poids psychologique énorme d’être reponsables de millions de morts, et je parle bien de millions de morts au fil des ans, pas d’un décès occasionnel ou d’une obscure toxine qui ne tuerait que quelques personnes. Il faut donc qu’ils acceptent cette nouvelle ou qu’ils refoulent leur sentiment de culpabilité en niant complètement les faits. C’est la direction choisie par la plupart d’entre eux et ils se sont entourés de gens qui vont leur dire ce qu’ils ont envie d’entendre, parce que leur dire autre chose serait inacceptable pour eux.
P.T : Les cow-boys de la publicité sont les missionnaires de Marlboro, symboles des certitudes de l’entreprise, symboles de l’assurance de Marlboro.
Publicité Marlboro : Venez où est la saveur, venez au pays de Marlboro.
P.T : Le Montana aussi est le pays de Marlboro. Ray Madson est un cow-boy du Montana, un solitaire, un vagabond, un fumeur.
Ray Madson : J’ai commencé à fumer entre 18 et 19 ans. Je suppose que si c’était à refaire je ne le ferais pas. Mais je n’ai pas une seconde chance.
P.T : Il a été opéré pour un cancer du poumon.
Ray Madson : L’autre jour j’ai vu ce jeune gars fumer et je lui ai dit qu’il ne devrait pas commencer, ce qui m’était arrivé. Je lui ai montré ma cicatrice. Ca n’a pas du tout eu l’air de l’inquiéter.
Médecin de Ray Madson : Les chances de survie de Ray sont nulles. Je vois environ un nouveau patient chaque semaine avec un cancer du poumon. 95% de ces gens sont des fumeurs. Ils n’auraient pas ce cancer s’ils ne fumaient pas. Ray a seulement 47 ans. Son cancer est incurable. C’est tragique.
P.T : Pourquoi 90 à 95% des gens qui ont un cancer du poumon sont-ils des fumeurs ?
James Bowling : Je ne crois pas avoir déjà entendu ces chiffres, Peter. Mais pourquoi 98% des fumeurs n’ont-ils jamais rien ? C’est une question intéressante. Ou pourquoi est-ce que des non-fumeurs ont un cancer du poumon ? Est-ce que çà ne signifie pas que nous n’en savons rien, que personne ne sait ?
P.T : L’Institut Américain du Cancer conteste les chiffres avancés par M. Bowling. Les statistiques indiquent qu’aux Etats-Unis un fumeur sur dix est victime d’un cancer du poumon. Le rapport de l’OMS conclue que fumer est lié au cancer de la langue, du larynx, de l’oesophage, du pancréas, du foie ; ainsi qu’à des fausses couches, des morts à la naissance, des ulcères du gastroduodenum. Et le plus important, fumer est un facteur causal du cancer du poumon, de la bronchite chronique et des maladies cardiovasculaires.
Dr Horn : Nous savons par exemple que le monoxyde de carbone joue un rôle important dans le développement des crises cardiaques. Il y a 12 ans nous l’ignorions. Nous savons que la nicotine accroît la demande en oxygène pour le coeur, parce qu’elle libère dans le sang certains enzymes.
Nous ne le savions pas il y a quelques années. Nous savons que les fumeurs ont plus de risques d’artériosclérose, c’est à dire de durcissement des artères que les gens qui ne fument pas.
P.T : Junior Farris, 62 ans, roi du rodéo en Oklahoma, un dur, dur avec les chevaux, dur dans sa vie, un gros fumeur. Jusqu’à sa crise cardiaque. Ses médecins lui ont demandé d’arrêter de fumer. Il a essayé. Il a échoué.
Junior Farris : Alors j’ai recommencé à fumer, même plus qu’avant. Et je me suis mis à cracher du sang et d’autres trucs et mes jambes ont lâché. Je ne pouvais plus tenir debout. Alors j’ai pensé qu’il y avait quelque chose qui clochait et je suis resté allongé, puis j’ai rampé jusqu’à la grange où il fait frais et je me suis interrogé. Je me suis dit que ce n’était pas une nouvelle crise cardiaque.
P.T : Cette fois c’était un cancer du poumon.
Médecin de Junior Farris : Il a un cancer du poumon parce qu’il fume. Je vois au moins 50 cas de cancer du poumon par an. Je n’en ai aucun qui ne soit pas associé à un fort tabagime et je pense que fumer en est la cause.
P.T : Depuis près de 20 ans Philip Morris a dépensé des millions de dollars pour étudier les ingrédients de la fumée de tabac. Les recherches sont menées par les instituts qu’ils financent ainsi que l’ensemble de l’industrie du tabac. Ces données sont constamment revues par des experts internationaux. Les conclusions demeurent identiques. Les cigarettes sont nocives, notamment parce que la fumée de tabac contient des substances cancérigènes, qui provoquent le cancer.
Dr Wakeham : Il y a des hydrocarbures polycycliques dans la fumée.
P.T : Et ils sont cancérigènes ?
Dr Wakeham : Dans certaines circonstances, avec des animaux de laboratoires, certains ont été identifiés comme cancérigènes.
P.T : Le rapport de l’OMS indique qu’il y a d’autres cancérigènes, comme les nitrosamines, la betanaphtalamine. Il y a aussi une grande variété d’irritants comme l’acryline, l’oxyde nitrique, le
dioxyde d’azote et des co-cancérigènes comme le créosol et les phénols. Vos recherches sont-elles différentes ?
Dr Wakeham : Non.
P.T : Vous êtes donc d’accord avec çà ?
Dr Wakeham : Je suis d’accord avec le fait qu’il y a de nombreux articles qui indiquent la présence de ces substances dans la fumée.
P.T : Et votre propre recherche le montre ?
Dr Wakeham : Dans certains cas. Nous n’avons pas examiné toutes ces substances.
P.T : Pouvez-vous dire que les cigarettes ne sont pas nocives pour celui qui les fume ?
Dr Wakeham : Je ne suis pas en position de le dire. Je ne sais pas ce qui est nocif pour le fumeur et ce qui ne l’est pas. Honnêtement je n’en sais rien. Vous devez essayer de me faire admettre que fumer des cigarettes est nocif.
James Bowling : De notre point de vue, si quiconque avait identifié un élément dans le tabac ou dans la fumée qui serait nuisible à la santé humaine ou qui ne devrait pas y être, nous pourrions l’éliminer. Mais pesonne ne l’a jamais fait.
P.T : Mais votre propre service de recherche a identifié ces composants. Le Dr Wakeham m’a dit qu’il est d’accord sur la présence dans la fumée de tabac de cancérigènes.
James Bowling : En quantités que l’on peut considérer importantes? Je ne crois pas.
P.T : Celà dépend du nombre de cigarettes que l’on fume. Mais il est d’accord sur la présence de cancérigènes dans la fumée de cigarettes.
James Bowling : Il y en a certainement ausi dans l’air de New York.
Dr Wakeham : Aucun des composants trouvés dans la fumée de tabac n’est à une concentration que l’on peut considérer comme nocive.
P.T : Mais on peut considérer ces composants comme nocifs en eux-mêmes, n’est-ce pas ?
Dr Wakeham : N’importe quoi peut être considéré comme nocif. La compote de pommes est nocive si vous en mangez trop.
P.T : Je ne crois pas que la compote de pommes tue beaucoup de monde.
Dr Wakeham : On n’en mange pas assez.
P.T : On fume beaucoup de cigarettes.
Dr Wakeham : Voilà comment je vois les choses : les gens qui mangent de la compote de pommes meurent ; les gens qui mangent du sucre meurent ; les gens qui fument des cigarettes meurent.
Est-ce que le fait que les gens qui fument des cigarettes meurent prouve que c’est à cause de çà ?
James Bowling : J’ai choisi de fumer. Je pense que j’ai été averti, effrayé comme tout le monde, mais j’ai lu toutes les recherches. Ma femme fume, mes enfants fument. Je ne sais pas pourquoi l’on fume, sauf que celà semble nous procurer un certain plaisir. Je n’ai pas le choix, je suis obligé de respirer l’air de New York, mais j’ai la possibilité de choisir, une petite liberté personnelle encore présente, je peux choisir ma marque de cigarettes et j’ai choisi les extra-longues. En attendant, la recherche doit continuer.
P.T : L’évidence est chaque jour plus forte et surtout dans les poumons des fumeurs de cigarettes du monde entier. Nous voici dans les montagnes du Wyoming. Voici un de ces guides : Harold Lee, 62 ans, n’a plus que quelques semaines à vivre. Une autre victime du cancer du poumon.
P.T : Vous avez beaucoup fumé ?
Harold Lee : Oh oui, j’ai fumé pendant 30 ans. J’ai fumé et j’ai perdu.
Mme Harold Lee : Maintenant il n’est plus qu’un pauvre petit homme. Il n’a plus de force, plus d’espoir, et je crois qu’il s’en fiche.
P.T : Comment vous sentez-vous maintenant Harold ?
Harol Lee : A l’instant même ? Terrible.
Mme Lee : Quand ce sera fini, il veut retourner dans les montagnes. Il veut que ses cendres reposent quelque part, quelque part dans les montagnes du Wyoming.
Médecin de Harold Lee : Harold est complètement incapable de prendre soin de lui même. Il dépend des autres pour les choses les plus simples. Je crois qu’il est maintenant dans cet état parcequ’il a fumé. S’il n’avait pas été un fumeur, je ne pense pas qu’il serait dans cet état maintenant.
P.T : Est-il possible que votre refus d’accepter l’évidence soit lié au fait que vous fabriquez des cigarettes ?
James Bowling : Est-ce que c’est possible ? Bien sûr que c’est possible, Peter.
Je pense que je suis quelqu’un de plutôt raisonnable et je ne me tiens pas à l’écart des autres membres de la société. Je ne ferais certainement pas ce métier si je croyais que les cigarettes sont nocives pour les gens. Je pense qu’il est important que nous soyons nombreux à essayer de garder la recherche ouverte et honnête. Je pense que la vraie malhonnêteté est de dire aux gens des choses qui ne sont pas vraies.
P.T : Dites-vous que les cigarettes sont sans danger ?
James Bowling : Je ne sais pas. Je ne sais pas si elles sont nocives ou non. Ce que je dis c’est que quelqu’un devrait trouver la réponse.
Dr Daniel Horn : Il y a eu très peu de choses dans l’histoire de la médecine que nous avons su avec autant de certitude que le fait de fumer engendre une grande variété de maladies qui sont responsables de la mort prématurée de centaines de milliers de personnes aujourd’hui, dans le monde entier.
Publicité Marlboro : Venez où est la saveur. Venez au pays de Marlboro.
Bob Julian : Ca m’a pris des années pour vraiment réaliser que tout ce que j’ai gagné à fumer, c’est un cancer du poumon… j’ai 51 ans.
P.T : Bob Julian est mort juste après son 52ième anniversaire, d’un cancer du poumon.
John Holmes : C’est comme si quelqu’un m’étranglait et que l’air ne passait plus…
P.T : John Holmes a survécu plus de dix ans à son emphysème. Il est maintenant décédé lui aussi.
John Harlin : Je n’avais jamais pensé avoir un cancer du poumon.
P.T : John Harlin est mort d’un cancer du poumon dans l’année qui a suivi la réalisation du reportage.
Ray Madson : Je lui ai dit qu’il ne devrait pas commencer, ce qui m’était arrivé. Ca n’a pas eu l’air du tout de l’inquiéter.
P.T : Ray Madson est maintenant mort d’un cancer du poumon.
Junior Farris : J’ai pensé qu’il y avait quelque chose qui clochait et je suis resté allongé, puis j’ai rampé jusqu’à la grange où il fait frais et je me suis interrogé.
P.T : Junior Farris, le champion de rodéo est mort, lui aussi, d’un cancer du poumon.
Mme Harold Lee : Il n’est plus qu’un pauvre petit homme. Il n’a plus de force, plus d’espoir et je crois qu’il s’en fiche.
P.T : Harold Lee est mort d’un cancer du poumon un mois seulement après la première diffusion de Mort dans l’Ouest.
Dr Wakeham : Nous sommes une entreprise très morale. Je pense que les dirigeants de Philip Morris sont sincères sur ce point.
P.T : Le Dr Wakeham a pris sa retraite cette année comme Vice-Président pour la science et la technologie de Philip Morris, mais il y travaille encore comme consultant.
James Bowling : Je pense qu’il est important que nous soyons nombreux à essayer de garder la recherche ouverte et honnête. Je pense que la vraie malhonnêteté est de dire aux gens des choses qui ne sont pas vraies.
P.T : James Bowling a eu une promotion. Il est maintenant Premier Vice-Président pour les relations publiques de Philip Morris et Assistant du Président du Conseil d’Administration.
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