Faire de la fioriture un style. L’explorer au creux des Fleurs du désert. Dans les méandres des Bidonvilles. C’est que nous propose Véronique Leclézio avec Mille fiori, du 17 au 21 avril à la galerie du Moulin Cassé à Péreybère.
Terres brûlées, qui une fois arrosées, se couvrent de pépites multicolores. Définition qui s’applique autant aux «Fleurs du désert»qu’aux «Bidonvilles».
Elle n’a pas chômé, Véronique Leclézio.
Deux expositions en une. Duo de réflexions, sur une même palette de
couleurs. Alors qu’à priori, les Fleurs du désert n’ont pas grand-chose
en commun avec les Bidonvilles.
Qu’à cela ne tienne, le peintre les juxtapose du 17 au 21 avril à
la galerie du Moulin Cassé à Péreybère. Sous le titre Mille fiori.
Piste pour suivre les fioritures – ornements, accessoires ajoutés
à un ensemble. D’abord ne nous y trompons pas. La peinture de Véronique
Leclézio n’est pas décorative.
Trop impressionniste pour être réduite aux sensations de chaleur que
dégage la dominance de couleurs primaires. Trop cubiste pour nous retenir
seulement dans les limites des formes et ne pas ouvrir des portes permettant
de poursuivre la lecture hors du tableau.
Les Bidonvilles de Véronique Leclézio sont géométriques, ordonnés.
Tout est à sa place. Les briques sur le toit. Les silhouettes fugitives.
Le peintre en fait des séries où dominent tour à tour le rouge et
le bleu. Changeant de ton au fil des tableaux. Jouant le contraste avec
le fond noir pour relever les formes. Et en fait un élément répétitif
des toiles exposées.
Couleurs gaies pour sujet grave
Curieuse sensation de couleurs gaies pour aborder un sujet grave, celui
de la misère, de l’exclusion. Volonté du peintre de nous faire regarder
ce que peut-être nous ne voulons pas voir. Ce que nous ne voyons pas.
Ces tôles rouillées retenues par du fil de fer, ces maisons en patchwork,
avec dans l’embrasure d’une porte, une silhouette d’enfant mal
nourri. Là, l’explosion de couleur orchestrée par le peintre attire
forcément le regard. Le retient sur ces toits fragiles, ces sols nus,
ce maigre linge mis à sécher. Les contrastes durs – noir contre
vif – vont jusqu’à la surcharge. Parfois, on ne sait où regarder
tant les couleurs se chevauchent, se chamaillent pour exister.
Sans transition. Nous tombons au pied des Fleurs du désert. Leur parfum
semble âcre. Leurs formes lunaires. Leur toucher empoisonné. C’est
en tout cas les sensations qui se dégagent de cet ensemble aux tons
à la limite du toxique. Buissons rouge vif, arbres bleus, feuilles
jaunes. Encore une fois, le coup d’oeil vous laisse des tâches de
couleurs au fond des yeux, mais l’ensemble reste paradoxalement ténébreux.
Les ciels pastel sont lourds et bas. Ils occupent presque toujours le
tiers supérieur du tableau. Les montagnes sont coupées, les fleurs
en pointillées.
Bien sûr. Il s’agit là d’une vision artistique d’un désert
prolifique. Car pour chaud et aride qu’est le désert de Véronique
Leclézio, il est plus chargé de fleurs qu’un parterre entretenu.
D’ailleurs elle le dit elle-même, «Il n’est de terre aride qui
ne recèle de trésor infini. Que la terre assoiffée recueille l’ondée,
elle se couvre de pépites multicolores.»
Aline GROËME-HARMON
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