Gérard Mathern et Jean Perriot m'ont transmis ce courrier qu'ils ont adressé au Parisien Libéré en souhaitant que je le publie aussi sur le blog. C'est chose faite.
Docteur Gérard MATHERN
Pneumologue-tabacologue
Coordonateur de l’enseignement au DIU de tabacologie
Secrétaire Général de l’IRAAT
(Institut Rhône-Alpes Auvergne de Tabacologie)
Hôtel-Dieu, 1 Place de l’Hôpital 69001 Lyon
Docteur Jean PERRIOT
Pneumologue – Tabacologue
Coordonateur de l’enseignement au DIU de tabacologie
Chargé de mission à l’IRAAT (Clermont-Ferrand)
Auteur de plusieurs ouvrage de tabacologie
à
Madame Alexandra
ECHKENAZI
Madame,
A plusieurs
reprises, votre journal s’est fait l’écho de prises de positions
d’un praticien à propos de la manipulation dont sont l’objet les
fumeurs en utilisant les produits mis à leur disposition par l’industrie
pharmaceutique. Ces produits composent la pharmacopée dont les praticiens
ont le besoin et l’usage dans la menée du sevrage tabagique.
Ce praticien
semble ignorer l’étendue de la problématique du fumeur. Certes,
fumer est un comportement appris. Mais ce comportement est amplifié
et entretenu par une dépendance aux produits contenus dans la fumée
de tabac et dans le tabac lui-même dont la Nicotine est en tête de
liste.
Négliger les deux éléments de cette réalité est une négligence coupable car imprudente pour les fumeurs les plus dépendants qui ne pourront s’arrêter en dehors de ce type de prise en charge et dont, selon les prévisions, 50% décèderont des conséquences de leur tabagisme.
Toutes les personnes dépendantes au tabac connaissent cette envie de
fumer irraisonnée et irrépressible que nous nommons le « craving ».
L’absence de tabac conduit à des troubles de l’humeur, de l’appétit,
du sommeil, du rythme cardiaque et de la pression artérielle.
Cette
dépendance « physique » est mesurable et l’adjonction de Nicotine
par substitution permet de lutter efficacement contre elle.
L’apparition
de nouveaux produits, d’abord le Bupropion (Zyban), puis la Varénicline
(Champix). Tous deux stimulent, comme la Nicotine, le système de récompense
du cerveau qui induit également le conditionnement du fumeur vis-à-vis
de la cigarette, sont de nouvelles armes efficaces qui viennent enrichir
l’arsenal thérapeutique jusqu’ici bien mince.
Une fois vaincue la dépendance physique, l’affaire n’est pas gagnée pour autant, et il faut alors faire face à la dépendance comportementale et psychologique nécessitant du temps, un suivi régulier.
Si ce comportement appris par le patient ne sera jamais gommé de son cerveau, il faudra, pour obtenir un sevrage durable, lui apprendre à ne pas fumer et à développer des stratégies de contournement de son envie. Ces deux éléments de l’aide au sevrage sont indissociables et les réfuter relève de la méconnaissance totale de la réalité du fumeur et des bases neurophysiologiques du tabagisme.
La modestie
des résultats découle de ce qui vient d’être dit. On ne traite
pas un comportement de dépendance comme une angine et heureusement !
Les résultats thérapeutiques ne peuvent être comparés.
Tenter de le faire confine à l’ignorance ou à la malhonnêteté intellectuelle. Pire, laisser entendre que l’on peut régler le problème de ses fumeurs, que par ailleurs on dit tant « aimer », autrement qu’en respectant les conceptions scientifiques et les règles du sevrage validées au terme des réunions d’experts, c’est avec bonne conscience les mettre un peu plus en danger faute de leur permettre d’avoir toutes leurs chances pour tourner la page de leur tabagisme.
Enfin ! La chape de plomb du dogme médical s'entr'ouvre sur la place publique...
Mon commentaire étant un peu long je l'ai publié (avec trackback) à
http://unairneuf.blogs.psychologies.com/billets/2007/05/debut_dun_debat.html
D'un côté les fumeurs, de l'autre les médecins qui prétendent leur imposer leurs fausses vérités : à votre avis qui va gagner ?
Rédigé par : Account Deleted | vendredi 11 mai 2007 à 02:36