C'est le titre d'un article du magazine Capital qui évoque l'évolution des stratégies de marketing des cigarettiers en France. Le texte intégral n'est pas accessible (au moins gratuitement) en ligne mais le résumé fourni par la MILDT est substantiel. Bien entendu parler d'un "flot de campagnes et de procès" qui aurait pu contrecarrer les milliards de l'industrie est totalement fallacieux: jamais les campagnes médiatiques anti-tabac n'ont été en France au niveau minimal où elles aurait dû être pour commencer à être efficaces. Quant aux procès, pour médiatisés qu'ils aient été et quoique leur nombre puisse sembler conséquent (j'en ai supervisé moi-même plus de 200 entre 1991 et 1997 alors que j'aurais pu engager 100 fois plus de poursuites si j'en avais eu les moyens tandis que le parquet n'en prenait l'initiative d'aucune) ils n'ont jamais sérieusement entamé les activités illicites des fabriquants: de toute façon les promotions -beaucoup plus difficiles à combattre- auraient explosé (ce qui s'est produit), d'autant que l'Etat n'a jamais eu la moindre intention de s'y opposer. Il aurait été intéressant (et fondamental pour bien comprendre les enjeux que l'article de Capital se livre à une estimation des budgets comparés des actions de promotion (illégales mais tout à fait publiques) et des actions de prévention. Je doute que ces dernières représentent plus d'une semaine du budget de l'industrie et bien entendu elles correspondent à 0,0% des taxes perçues sur le tabac. Les 'prouesses" des cigarettiers (pour reprendre le vocabulaire de Capital) n'ont été possibles que grâce à la complicité active de l'Etat (du parquet aux douanes en passant par les finances et le ministère dit de la santé) et des représentants élus (qui se sont abstenus et continuent de s'abstenir de prendre les mesures qui sont nécessaires). Gare à ceux qui osent dire que le roi est nu...
CAPITAL qui révèle « Les astuces de Marlboro pour griller Gauloises »,
estime que la bataille n’a jamais été aussi rude entre les deux
premières marques de cigarettes en France, lesquelles « rivalisent
d’ingéniosité » pour « contourner les lois antitabac de plus en plus
sévères ». Indiquant que le 23 janvier dernier ce fut « champagne »
chez Gauloises et Marlboro quand un sondage révéla que le taux de
fumeurs était reparti à la hausse (31,8% des 15-75 ans contre 31,2% en
2004), le journal souligne que ce le fut d’autant plus que le phénomène
touche surtout les jeunes, c’est à dire « les acheteurs de demain ».
Le
mensuel qui considère que le flot de campagnes, de procès et
d’interdictions « aura été moins efficace que le redoutable savoir
faire » des deux équipes de cigarettiers, estime qu’il s’agit là d’une
« véritable prouesse » quand on connaît toutes les interdictions aux
quelles ils sont confrontés.
D’après le magazine, ce sont « leurs efforts intenses qui soutiennent la consommation » et c’est Marlboro qui a en le plus profité, tout en devant se battre pour imposer sa marque encore inconnue en France à la fin des années 60. Evoquant le ratissage des boîtes de nuit, restaurants et clubs de tennis que la marque a effectué pendant des années, la revue note que peu à peu la Marlboro est devenue une cigarette haut de gamme, ce qui a poussé la Seita a lancer la Gauloise blonde qui fit « un carton » en étant 30% moins chère que la Marlboro.
Le journal qui indique qu’en 2004, avec la politique de prix minimum du paquet et de hausse des taxes, cet écart de prix est tombé à 10%, précise que Gauloises est alors allée sur le terrain du packaging en créant des séries pour attirer les collectionneurs puis en modernisant le design du paquet. Rappelant que la justice a condamné Gauloises en 2006 pour « décoration » interdite, le mensuel signale que « l’autre grand terrain d’affrontement se situe sur les lieux de vente » - les 31000 bureaux de tabac où la promotion est encore autorisée - et dont les commerciaux de Philip Morris font à longueur d’année la tournée, proposant divers produits et méthodes aux buralistes pour mettre en valeur leur marque, sachant qu’ils les « arrosent ». aussi « copieusement de petits cadeaux » d’une valeur moyenne d’environ 600 euros par an et par buraliste.
Si, d’après le journal, les commerciaux de Gauloises ne sont pas moins généreux, ils sont toutefois moins nombreux et c’est plutôt dans les boîtes de nuit que « l’ex Seita mène la danse » en démarchant activement les patrons de discothèques et en leur offrant des cadeaux divers en échange de la vente de ses paquets.
Précisant que Marlboro se rattrape « ô combien » avec la télé et le sponsoring sportif, ce qui lui permet de « s’offrir une notoriété planétaire », Capital souligne que la loi française ne peut rien contre les retransmissions d’événements sportifs à l’étranger, ce qui a fourni à Marlboro en 2006, 93,5 millions d’euros d’équivalents publicitaires alors que Gauloises a du se contenter de 2 millions d’euros.
D’après le magazine, « l’autre atout » de Marlboro a été l’ouverture de boutiques de vêtements sous l’enseigne « Marlboro Classics », pour laquelle il a signé un contrat de licence avec un groupe de mode par l’intermédiaire d’une filiale, tout en niant toujours le moindre lien. Soulignant que le tribunal a condamné deux de ces boutiques à des amendes, les enjoignant de retirer les panneaux contenant le mot « Marlboro », le journal précise que la chaîne de vêtements, qui avait obtenu des jugements favorables pour ses ponts de vente parisiens, a fait appel de ces deux jugements. Suit un développement sur le cinéma où les deux cigarettiers « slaloment avec la législation ».
D’après Capital, Marlboro a versé de l’argent pour apparaître dans « Apocalypse Now » et « Superman 2 », ce qui est désormais interdit aux Etats-Unis et en France mais il a toutefois réussi aussi à placer sa cigarette dans 26 films sortis en France en 2006, comme « L’ivresse du pouvoir » et « Ne le dis à personne » où les principaux acteurs fument sans désemparer. Pour sa part Gauloises apparaît dans six longs métrages.
Un avocat explique « en échange de quelques apparitions un fabricant prend en charge le prêt de dizaines de véhicules nécessaires au tournage ou les frais d’hébergement de l’équipe ». La revue qui analyse aussi l’action sur l’opinion, assure qu’ainsi, en 2006, Philipp Morris a versé de l’argent à l’association Ni putes ni soumises et à l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, le patron de Philipp Morris figurant parmi les membres fondateurs de cet institut. Un cancérologue de renom « s’étrangle » « c’est comme confier la gestion de la banque du sang à Dracula ».
Observant que pour sa part Altadis « à réduit la voilure », le magazine affirme que ces dernières années il finançait encore le colloque de La République des idées ou la Fondation de la deuxième chance.
Et enfin un point sur le lobbying, où rappelant que le patron d’Altadis est un ancien de Bercy, le mensuel affirme que le cigarettier a réussi à faire repousser à 2008 l’interdiction de fumer dans les bars et restaurants, sachant par ailleurs que l’un des conseillers de Nicolas Sarkozy, lorsqu’il était à l’intérieur, avait conservé des actions dans un cabinet de lobbying qui avait pour client Altadis.
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