Je ne l'aurais pas cru possible mais Le Monde l'a osé. Probablement pour faire contrepoint à l'entrée en vigueur de l'interdiction de fumer dans tous les lieux publics. Une opinion signée par une femme médecin en faveur de la liberté de fumer dans les lieux publics. Pitoyable de la part de son auteur et aussi du journal qui nous sert ainsi une ènième fois les mêmes arguments bidons. A conserver néanmoins pour l'histoire et pour la collection.
Comme le dit un des commentaires:
L'histoire du fumeur qui demande avant s'il dérange, c'est un article humoristique ? un gag ? Etes-vous vraiment allés au moins une fois dans un restaurant, un café,ces dix dernières années ? On peut vraiment écrire n'importe quoi dans la rubrique "Point de vue"? Da façon plus sérieuse, il me semble que nous sommes à la limite de ce qu'un journal comme Le Monde peut publier, même sous prétexte de "point de vue".
Les fumeurs, ces exclus de l'espace public, par Micheline Benatar
L'interdiction de fumer dans les lieux publics est donc générale et absolue et sont déjà mises au point les procédures de contrôle. Cette interdiction, en France comme en Europe, est bien reçue : personne pour protester ou s'en émouvoir, fumeur comme non-fumeur. Les "bien-pensants", non-fumeurs, ex-fumeurs heureux d'avoir réussi et antifumeurs sont soulagés. Quant aux autres, les fumeurs, ils sont tétanisés : comment faire désormais pour vivre fautif donc coupable, sans pour autant être exclu de la société désenfumée ?
Cet espace public est pourtant le lieu des convivialités, des croisements et des rencontres, c'est là que l'autre nous apparaît dans sa différence. Il est donc pour le moins inquiétant qu'une différence, dans cet espace ouvert à tous, soit stigmatisée. Pourquoi renoncer maintenant à ce qu'est le dialogue et l'éducation ? Pourquoi ne pas faire confiance à ceux qui sauront demander "est-ce que la fumée vous dérange ?" et n'allumeront pas la cigarette qu'ils s'apprêtaient à fumer par égard, respect, écoute de l'autre.
Que penser de cette société qui s'esquisse ainsi et impose à l'individu de se cantonner dans l'espace privé, donnant à la valeur "liberté publique" le seul sens de "pratique privée" ? Pratique privée ou plaisir solitaire...
C'est faire bien peu de cas, direz-vous, de cet impératif de santé (publique, elle...) : rappelons simplement que si la première cause de mortalité en France est bien la maladie cardio-vasculaire, le tabac n'en est qu'un des facteurs parmi d'autres, tels que, et dans l'ordre, l'hérédité, l'hypertension artérielle, le diabète sous toutes ses formes, les dyslipidémies. Autrement dit, "naître tue", "boire tue", "se mal nourrir tue" aussi. Certes, le tabagisme passif est une question de santé publique. Mais démarrer sa voiture n'est-il pas plus criminel que d'allumer une cigarette ?
A quand, dès lors, la taxe supplémentaire sur le patrimoine héréditaire, l'alcool et autres consommations d'existence - manière de TVA épidémiologique - à l'instar de la taxe que paye le fumeur à l'achat de son arme fatale ?
Jusqu'à quand le législateur autorisera-t-il les "menus à la carte" dans les restaurants ou cafés ou salons de thé ou brasseries... ? On pourrait ainsi continuer - en toute impunité ! - à débuter un dîner par un foie gras (arrosé bien sûr), le poursuivre avec un steak à la sauce béarnaise ou roquefort (et son vin), enchaîner avec ces "rondes des fromages" (on sait qu'un fromage sans vin est au moins aussi triste qu'un jour sans pain) pour achever ces agapes sur un vacherin nimbé de beaumes-de-venise et un café et son petit alcool de poire. Mais que fait la Loi ? Quand nous imposera-t-elle, et pour notre bien, des menus diététiques dont les composants seront garantis "non génétiquement modifiés" et - sur demande - traçables ? Quand nous garantira-t-elle par ces repas - sans sel, sans alcool ni graisses mélangées - une tension artérielle stable, une stabilité basse du taux des triglycérides, du cholestérol et de la glycémie ? Comment tolère-t-on encore dans ces lieux publics la présence d'hypertendus, d'obèses, parce que "ces gens-là" ont de toute évidence triché avec la qualité et la quantité. Qu'ils se goinfrent chez eux - manger tue - et pas dans l'espace public !
Et ne serait-il pas équitable que les non-fumeurs, les non-buveurs et les sains mangeurs puissent obtenir réparation des dommages causés à eux-mêmes ou à leurs proches par fumée, alcool, alimentation trop riche. Alors ? Couverture-dommages universelle ? Mutuelle, avec ou sans franchise ? Si le fumeur ne doit plus se placer à côté d'un non-fumeur, l'alcoolique ne doit pouvoir croiser le chemin d'un non-buveur, et le gourmet gourmand tenter le sain mangeur...
Une société sans l'Autre, le différent, qu'il soit fumeur heureux, buveur détendu ou bien gourmet, est une société totalitaire...
Docteur Micheline Benatar, médecin
Article paru dans l'édition du 02.01.08.
En matière de tabagisme, Le Monde a toujours été assez conservateur. On peut suspecter une proximité avec les contraintes commerciales et publicitaires. La presse papier, et notamment la presse quotidienne payante, va mal.
Les choses intéressantes se passent sur le web, qui devient de plus en plus la référence... 2008 verra quelques évolutions radicales on peut le craindre, en témoigne la bagarre entre Le Monde et lemonde.fr, ce dernier étant, lui, rentable !
Rédigé par : Account Deleted | mercredi 02 janvier 2008 à 02:05