En guise d'avant propos à l'entretien avec Daouda.
A l’occasion de l’atelier de renforcement des capacités pour la mise en œuvre de la Convention-Cadre de lutte anti-tabac tenue à Casablanca à l’initiative de Framework Convention Alliance (F.C.A.), près d’une trentaine d’activistes anti-tabac africains francophones se sont découverts et ont partagé leur expérience en matière de stratégies de lutte au regard de leur environnement africain francophone. Cet atelier a généré un esprit de solidarité et de franche collaboration entre ses membres dont les effets se poursuivent encore aujourd’hui.
Au
cours de cet atelier, il a été convenu que les expériences des uns
et des autres étaient enrichissantes pour tous. Ce sont ces expériences
que nous rapportons dans ce blog.
En Mai, Mohamed OULD SIDI nous a édifié sur les
difficultés que rencontrent les ONG de lutte anti-tabac au Burkina
Faso. Il a par ailleurs présenté quelques aspects de la publicité
en faveur des produits du tabac dans son pays, le Burkina Faso.
Aujourd’hui, c’est un autre activiste, également présent à Casablanca en 2005, qui nous dépeint le tableau du tabagisme dans son pays, le Tchad, à travers un entretien où transpirent la sympathie, la générosité et l’humilité de l’interviewé, Daouda ELHADJ ADAM.
Pascal Bogui: Mon Cher Daouda, peux-tu te présenter à nos activistes anti-tabac ?
Daouda ELHADJ ADAM: Je suis Daouda Elhadj Adam, gestionnaire comptable, marié, et père de deux garçons. Au plan de la lutte anti-tabac, je suis Secrétaire Général de l’Association pour la Défense des Droits des Consommateurs (A.D.C.) du Tchad. Je suis également Trésorier Général de l’Observatoire du Tabac en Afrique francophone (OTAF).
Q2. Pascal Bogui: Comment, en tant que gestionnaire-comptable, t’es-tu retrouvé engagé dans la lutte anti-tabac ?
Daouda ELHADJ ADAM: Je dois dire que déjà, lorsque j’étais étudiant, j’étais très passionné par les questions de consommation en général. Cette passion m’a amené à adhérer en 1995 à l’association pour la défense des Droits des Consommateurs dont je suis le secrétaire général en ce moment. Mon engagement dans la lutte antitabac date de 1997 et ce, grâce au Centre Français d’information des entreprises, une ONG française travaillant sur les questions liées à la responsabilité sociale des entreprises françaises en France et dans le monde. En effet cette ONG avait consulté notre association par le biais de l’Organisation Internationale des Consommateurs (OIC), notre organisation fédérale, afin de la situer par rapport à une information selon laquelle les paquets de cigarettes produits par les entreprises françaises et vendues au Tchad ne comportaient pas d’avertissements sanitaires. Notre organisation avait en son temps mené l’enquête et avait constaté que cette information était vraie. Depuis lors, j’ai commencé personnellement à m’intéresser aux questions liées au tabac. C’est ainsi que j’ai mené des actions de plaidoyers en direction des Pouvoirs Publics pour réclamer une réglementation relative à l’inscription obligatoire d’avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes vendues au Tchad. Ce qui fut fait en 2000.
Le déclic
de mon engament personnel a été ma participation à la 11ème
Conférence Mondiale sur le Tabac ou la Santé tenue en septembre 2000
à Chicago (USA), précédée d’une pré conférence qui m’a permis
de renforcer mes capacités sur les questions liées à la lutte antitabac.
Q3. Pascal Bogui: Après avoir bénéficié d’un renforcement de tes capacités à la 11ème conférence, quels sont les actions que tu as menées une fois de retour dans ton pays ?
Daouda ELHADJ ADAM: Dès mon retour, j’ai élaboré un plan d’action de lutte antitabac comportant deux axes majeurs :
1 - l’information et la sensibilisation des jeunes sur les méfaits du tabac
2- la mise en place d’un cadre législatif et réglementaire de lutte antitabac.
Ce plan d’action a bénéficié de l’appui financier de l’Américain Cancer Society pour sa mise en oeuvre.
Q4. Pascal Bogui: Peux-tu nous éclairer sur le but et les objectifs de ta structure en matière de lutte anti-tabac ?
Daouda ELHADJ ADAM: Mon association a pour but la protection des intérêts des consommateurs. Elle s’occupe de toutes les questions de consommation et poursuit les objectifs ci-après : la protection des intérêts économiques - l’information et la formation des consommateurs – la prévention sanitaire et environnementale – l’amélioration du cadre de vie.
En ce qui concerne
le tabac, compte tenu du fait que c’est le seul produit de grande
consommation légalement vendu et qui tue la moitié de ses consommateurs
réguliers, mon association a créé en son sein une Cellule antitabac
chargée de la mise en œuvre de son programme antitabac.
Q5. Pascal Bogui: De quels moyens matériels, financiers et humains dispose ta structure pour atteindre ses objectifs?
Daouda ELHADJ ADAM: En ce qui concerne
les moyens humains, nous nous appuyons sur les ressources internes de
l’association. Il s’agit des membres des commissions juridiques,
scientifiques, économiques ainsi que notre groupe d’animation et
de théâtre, de notre réseau des femmes. Quant aux ressources financières
et matérielles, nous avons certes bénéficié de l’appui financier,
matériel et technique de l’Américan Cancer Society et de l’Observatoire
du Tabac en Afrique Francophone (OTAF), de la ligue National contre
le Cancer de France, de Globalink, de l’Institut National du cancer
(INCA) . Mais ces ressources sont insuffisantes par rapport à nos besoins.
Q6. Pascal Bogui: Penses-tu que les ressources financières sont capitales pour l’atteinte des objectifs de ton organisation?
Daouda ELHADJ ADAM: Certes, les ressources financières sont très utiles pour la vie et le développement de toute organisation fut-elle une organisation à but non lucratif.
Toutefois, au sein de notre organisation, nous avons toujours priorité à l’engagement et à l’ingéniosité de nos membres, autrement dit au capital humain.
Par exemple en 2002, le président de notre commission scientifique occupait par ailleurs une position majeure au niveau du jury du baccalauréat. Il a profité de sa position particulière pour convaincre les professeurs d’anglais de proposer aux séries scientifiques C et D une épreuve dont le thème principal portait sur « le tabac et ses méfaits ».
Par cette seule initiative, il a largement contribué, à coût nul par ailleurs, à la sensibilisation des bacheliers promotion 2002 des séries scientifiques et de leurs professeurs sur les conséquences sanitaires, sociales et économiques du tabagisme.
Voilà comment un activiste peut user utilement de sa position pour faire passer un message fort, ou pour susciter une réflexion profonde dont les effets bénéfiques sont durables pour lui-même et pour la société. C’est bien sûr ce genre de comportement que nous encourageons en premier lieu de la part de nos membres.
Q7. Pascal Bogui: Cet exemple est édifiant et mériterait d’être connu car il inspirera nombre d’activistes. Au plan plus concret, peux-tu nous indiquer les résultats obtenus ou les activités déjà menées par ton organisation ?
Daouda ELHADJ ADAM: Je citerai par exemple :
- l’obligation faite par arrêté interministériel aux entreprises relatives aux mentions sanitaires sur les paquets de cigarettes,
la sensibilisation des élèves des trois grands lycées de la ville de N’Djaména, la capitale,
- l’élaboration d’un avant projet de loi antitabac,
– la réalisation en 2004 et 2005 de deux enquêtes sur le taux de prévalence chez les jeunes scolarisés,
- l’interdiction du parrainage par l’industrie du tabac de la revue de la fédération tchadienne du football.
- la signature, la ratification de la CCLAT etc.
D’ailleurs, et en toute fierté, j’indique que notre association a été lauréate du prix OMS 2003.
Q8. Pascal Bogui: Félicitations pour cette distinction. Car effectivement les actions pour la lutte anti-tabac posées par ton organisation sont majeures, surtout au regard des faibles moyens financiers dont elle dispose. Mais ces succès n’ont pu être obtenus sans embûche aucune. Que peux-tu nous dire sur les principaux obstacles que ton organisation a rencontrés ou rencontre dans l'exécution de sa mission, et quelles solutions propose-t-elle pour y remédier?
Daouda ELHADJ ADAM: Ce sont, en plus du manque criard de moyens financiers, toujours les mêmes obstacles qui minent toute organisation africaine oeuvrant contre un fléau comme le tabagisme dont les conséquences sont largement sous estimées par les Pouvoirs Publics : absence d’une vraie volonté politique à s’engager contre le tabagisme, la pauvreté, le problèmes de gouvernance etc. Ces obstacles n’ont rien de spécifiques au Tchad. Ils sont, à de rare exceptions près, partagés par la plupart des pays africains. Hélas ! ! !
Q9. Pascal Bogui: Tu fais allusion aux organisations de lutte anti-tabac des autres
pays africains qui connaissent les difficultés similaires à celles
que ton organisation éprouve. As-tu pu établir des relations avec
d’autres organisations africaines anti-tabac, telles que des Programmes
Nationaux de lutte contre le tabagisme, le bureau Afrique de l'OMS , l’O.T.A.F. ?
Daouda ELHADJ ADAM: D’une manière générale, nous entretenons de bonnes relations avec tous les acteurs de la lutte antitabac notamment, la représentation locale de l’OMS, les quelques rares ONG travaillant directement ou indirectement sur le tabac, les techniciens du Ministère de la Santé Publique en charge des questions liées au tabagisme. Pour l’heure, le Tchad ne dispose pas encore d’un programme national de lutte contre le tabagisme. Ce n’est qu’en 2005 qu’un point focal dédié au tabagisme a été nommé. Tu vois : les structures se mettent progressivement en place.
Q10. Quelles sont les priorités en matière de lutte anti-tabac que se fixe ta structure pour les cinq prochaines années ?
Daouda ELHADJ ADAM: L’ADC a 4 priorités majeures dans le domaine de la lutte contre le tabagisme :
1-la mise en place d’une législation nationale s’appuyant largement sur les dispositions de la CCLAT,
2- la mise en oeuvre des autres mesures préconisées par ce traité de Santé Publique notamment l’augmentation des taxes,
3- la sensibilisation des consommateurs sur les méfaits du tabac,
4- la création d’une structure d’aide au sevrage tabagique.
Mais notre structure a besoin de moyens pour atteindre ses objectifs, car la volonté seule ne suffit pas. C’est à la recherche de ces moyens qu’elle s’attelle.
Q11. Le Tchad a ratifié la Convention Cadre de l’OMS le 30 janvier 2006. A quel stade de sa mise en œuvre en est-on?
Daouda ELHADJ ADAM: Depuis la ratification intervenue en janvier 2006, la mise en oeuvre semble ne pas suivre et on observe au contraire une intensification des campagnes de publicité et de promotion des produits du tabac menées par les sociétés de production et de commercialisation du tabac. Ces campagnes se traduisent par une multiplication du nombre des panneaux sur les principaux axes de nos villes, du nombre des parasoleils et des kiosques aux couleurs des marques de cigarettes, des sessions de dégustation de nouvelles cigarettes lors des différentes manifestions, etc.
La publicité des cigarettes est donc présente et s’accentue au détriment de la santé publique et en particulier de nos jeunes qui se laissent enrôler par l’industrie du tabac.
Les résultats
des enquêtes que notre organisation a menées à NDjaména en 2005
et 2006 montrent que la consommation des produits du tabac chez les
jeunes prent des proportions inquiétantes faute de mesures fortes pour
freiner cette propension. Ces résultats montrent que 32% des élèves
âgés de 16 à 30 ans fument de la cigarette. Par ailleurs, il y a
un phénomène nouveau qui commence à se développer au Tchad. Il s’agit
de la consommation du Narguilé, la pipe à eau. Les jeunes s’adonnent
massivement à sa consommation. C’est une situation préoccupante.
Q12. Pascal Bogui: En tant qu’activiste, qu’entends-tu entreprendre pour faire changer les choses?
Daouda ELHADJ ADAM: La lutte contre
le tabac est avant tout politique. Notre rôle en tant qu’activiste
est d’intensifier les activités de plaidoyer et de sensibiliser
tous les acteurs concernés afin de sauver les générations actuelles
et futures contre ce fléau qu’est le tabagisme.
Q13. Pascal Bogui: Le mot de la fin à l’adresse des lecteurs anti-tabac ?
Daouda ELHADJ ADAM: J’invite
les lecteurs à cultiver la solidarité, à fertiliser les expériences
les plus réussies entre les activistes pour faire front commun contre
l’industrie du tabac.
Interview réalisé par Internet avec beaucoup d’amitié mutuelle entre Pascal BOGUI et Daouda ELHADJ ADAM
Bonjour,
J'adresse mes vives félicitations à Pascal et à Daouda pour ce travail.
Oui, Daouda a des qualités qu'il ne pourra pas évoquer lui-même. Mais, pour qui connait bien cet homme, on ne peut que apprécier l'oeuvre réalisée sous son impulsion.
Au nom de la C.P.E.A.C.T. (www.cpeact.org) , je te souhaite bonne continuation.
Thomas Léro
Coordonateur Gal / CPEACT
Rédigé par : Thomas Léro TCHASSAO | mardi 19 juin 2007 à 21:40
monsieur je suis un camerounais agé de 21 ans a la recherche d'un emploi et j'aimerai avoir une aide de vous.concernant ma formation académique j'ai un baccA4ALL.en outre j'ai déja déposé mes dossiers a adc.
Rédigé par : njongwa tayamnou terrence | mardi 08 janvier 2008 à 02:34
Le Directoire de l'Association Pro-consommateur (APROCO)vous presente ses compliments pour le travail combien important vous realisez en faveur les consommateurs et il profite de cette occasion pour solliciter votre collaboration dans le but de renforcer la lutte pour la protection et la defense des consommateurs.
Comptant sur votre reponse favorable,le Directoire vous prie de recevoir ses salutations les plus distinguees.
Pour le Directoire:Eddy MESIDOR
President.
Rédigé par : Association pro-consommateur (APROCO) | lundi 02 février 2009 à 18:01
Je tiens très fort à vous remercier. Nous sommes l'espoir pour une meilleure défense des intérêts des consommateurs du Sénégal, de l'Afrique et du Monde.
Je félicite Eddy MESIDOR d'être venu nous rendre visite au Sénégal (Union Nationale des Consommateurs du Sénégal "UNCS" et Association des Consommateurs du Sénégal "ASCOSEN").
Lamine Diédhiou
Rédigé par : Lamine Diédhiou | mercredi 15 avril 2009 à 06:35
Bonjour,
Le conseil d'administration de l'Association des Consommateurs d'Haïti (ASCOH) vous félicite pour ce grand travail si noblle, si appréciable et si louable que vous réalisez au sein de la population tchadienne. Nous en Haïti, notre travail est prèsqu'identique au votre. Nous travaillons dans 4 grands domaines:Comunications, Soins de Santé, Alimentation, Nutrition, Services financiers et question d'ordre général liées au marché. Nous aimerions établir un partenariat durable entre ces deux associations. Nos compliments!
Rédigé par : Association des Consommateurs d'Haiti (ASCOH) | jeudi 09 février 2012 à 11:48